Municipalités au Burkina : Une victoire « violente » et sans gloire du MPP
Le parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) va certainement rafler la grande majorité des mairies. Mais cette victoire écrasante est gravement sapée par les nombreux cas de violence au sein même du parti de Roch Marc Christian Kaboré.
« De tout temps nous avons fait des élections mais c’est vraiment la première fois que j’estime que nous avons franchi le Rubicon », a déclaré le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, le jour même des élections municipales. Malheureusement ces violences n’ont pas cessé. Elles se sont exacerbées à l’heure du choix des maires dans les différentes communes du pays. Et ce qui est embarrassant, c’est que cette violence se fait entre les membres du parti du président Roch Marc Christian Kaboré.
C’est la preuve que le parti au pouvoir souffre d’un cruel manque de cohésion. L’absence de consensus sur les candidats à la mairie a conduit des débordements violents dans certaines localités du pays. C’est le cas de la commune de Barani, dans la province de la Kossi. Selon le correspondant de la radio Omega , des individus ont fait irruption dans la salle où a lieu le vote du maire:
Alors que je trace ces lignes j’apprends que des affrontements entre partisans du MPP sont signalés dans la commune de Kantchari. C’est la région de l’Est du Burkina. Les candidats ont préféré recourir à la violence au lieu du vote pour se départager. Le résultat est sans appel :
« Un mort à Kantchari dans les histoires d’élection de maire. Et je ne parle pas des nombreux blessés par ci, par là. Ce sont deux camps d’un même parti, le MPP, parti au pouvoir qui se sont affrontés jusqu’à ce que mort s’en suive », a commenté le journaliste burkinabè, Boukari Ouoba.
Jointe au téléphone, une source me confirme la triste réalité. Elle ajoute que » tout est fermé en moment à Kantchari ». Selon notre source, MPP s’est divisé en deux camps qui s’affrontent sans merci. Ces deux cas de ne sont pas les seuls. Un peu partout le parti au pouvoir connait un problème de discipline interne.
L’élection du maire de Karangasso Vigue dans les Hauts Bassins a dégénéré en conflit politique opposant les militants MPP et ceux de la NAFA. Le bilan fait état de deux morts et d’une trentaine de blessés. La situation est encore tendue ce matin et des maisons sont en train d’être incendiées dans les villages environnants, malgré la présence des forces de l’ordre. Les autorités régionales et une délégation des députés sont sur place actuellement pour tenter d’apaiser la situation. (Les éditions Sidwaya)
Troubles pendant la campagne
Le siège de Commission électorale communale indépendante (CECI) de Bouroum-bouroum, dans la région du Sud-Ouest, a été incendié quelques jours des élections municipales. L’UPC ne passe pas par quatre chemins pour accuser le MPP. Selon le parti de Zéphirin Diabré, les militants du MPP « protestent contre le fait que, leur liste n’ayant pas pu être déposée à temps, la justice ne leur ait pas permis de se présenter aux municipales ». Le parti du lion va plus loin en nommant une ministre du gouvernement dans cette affaire.
La ministre de l’action sociale, Mme Laure ZONGO HIEN en personne, a tenu des rencontres à Bouroum-Bouroum le weekend dernier, au cours desquelles elle a encouragé ses camarades à empêcher le vote. Les cartes d’électeurs des habitants du village de Mingboura ont ainsi été récupérées moyennant la promesse d’un barrage. (Lefaso.net ). Une accusation sans doute rejetée par le parti au pouvoir. ‘’Je ne vois pas pour quelles raisons des militants du MPP vont incendier la CECI’’ a déclaré le secrétaire à la communication du MPP.
Au total trois communes n’ont pas exercé leur devoir citoyen le 22 mai 2016 à cause des troubles durant la campagne. Ce sont les localités de Zogoré (au Nord) et de Begodo (Centre-est) et bien sûr Bouroum-bouroum.
Pouvait-il en être autrement ?
Rien d’étonnant pour un parti qui regroupe des individus aux aspirations hétérogènes et contradictoires. On le sait tous. La ruée des anciens du régime de Blaise Compaoré ne pouvait pas faciliter la gestion du parti. On a changé de parti, mais l’esprit reste le même. Il y a les transfuges du CDP et ceux qui ont milité dans le MPP dès les premières heures de sa création. Les seconds, sous le prétexte de rechercher le changement, ne veulent pas accepter les premiers qui ont rejoint le navire un peu tard. Dans tous les cas ce sont des conflits que le parti devrait éradiquer. Si le parti n’ y prend garde, cette situation va causer sa perte aux prochaines élections.
Ces cas de violences devraient relativiser l’écrasante victoire du parti au pouvoir aux élections municipales du 22 mai 2016. Ils témoignent de la mauvaise santé du MPP, incapable de trouver des candidats unanimes. Les premiers responsables sont dans l’incapacité de mettre de l’ordre dans cette situation. Une victoire qui vire au drame pour un parti prône le changement.
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